Depuis quelque temps, une nouvelle tendance fait parler d’elle sur TikTok : le « ghetto-sori ». Un terme qui détourne la pédagogie Montessori pour justifier une éducation plus stricte, parfois humiliante, sous prétexte d’inculquer discipline et autonomie aux enfants. Mais derrière ces vidéos virales, on retrouve surtout des pratiques qui relèvent des violences éducatives ordinaires. Décryptage.
(Ci-dessous un exemple de ces vidéos ghettosori ou encore ghettosorry, il existe multiples orthographe étant donné que c’est un « néologisme ».
@bonitacaps Hahaha ma trend ça 🤱🏽 #maman #guettosoris #mamanparfaiteenpls
C’est quoi la tendance « ghetto-sori » ?
Tout part d’un jeu de mots entre « ghetto » et « Montessori ». L’idée derrière ce concept ? Mettre en avant une éducation plus « directe », où l’enfant est confronté à des situations dures censées le responsabiliser rapidement.
Sur TikTok, on voit par exemple des vidéos où un enfant qui se renverse un verre d’eau doit immédiatement nettoyer sans aide, ou encore un enfant qui exprime un besoin et reçoit une réponse cassante du parent pour « le forcer à se débrouiller ». L’objectif affiché est d’éviter une éducation trop permissive et de renforcer l’autonomie… mais la manière dont c’est fait pose question.
Pourquoi c’est un détournement de la pédagogie Montessori ?
La pédagogie Montessori repose sur trois piliers :
1. Le respect du rythme de l’enfant → Chaque enfant apprend à son propre rythme, sans pression.
2. L’accompagnement bienveillant → L’adulte est un guide, pas un supérieur autoritaire.
3. L’autonomie progressive → L’enfant est encouragé à faire seul, mais avec un cadre et un soutien adaptés.
Dans la tendance « ghetto-sori », ces principes sont totalement déformés. L’enfant est laissé à lui-même sans explication, parfois ridiculisé ou mis en difficulté de façon volontaire. On ne parle plus d’autonomie mais d’une forme d’apprentissage par la contrainte, voire par la peur.
Pourquoi cette tendance séduit-elle sur TikTok ?
Il y a plusieurs raisons à son succès :
Le rejet de la parentalité positive : Certains parents estiment que l’éducation bienveillante a rendu les enfants « capricieux » et veulent revenir à des méthodes plus dures.
L’attrait des vidéos choc : Les contenus qui divisent génèrent beaucoup d’engagement, ce qui les rend rapidement viraux.
Un effet de nostalgie mal placé : Certains y voient un retour à l’éducation qu’ils ont reçue et qu’ils jugent efficace, sans forcément en mesurer les impacts négatifs.
Les conséquences de cette approche sur les enfants
Même si l’intention est de « préparer les enfants à la vraie vie », cette approche peut avoir des effets négatifs :
Un impact émotionnel : L’humiliation ou le manque d’accompagnement peut générer un manque de confiance en soi.
Un apprentissage basé sur la peur : L’enfant obéit non pas parce qu’il comprend, mais parce qu’il craint la réaction du parent.
Un modèle relationnel toxique : Il risque de reproduire plus tard les mêmes schémas avec ses propres enfants ou dans ses relations sociales.
Que faire face à cette tendance ?
Plutôt que de tomber dans l’excès inverse d’une éducation ultra-laxiste ou trop autoritaire, il existe une alternative équilibrée : la fermeté bienveillante.
Fixer un cadre clair : L’enfant doit comprendre les règles et leurs raisons, sans humiliation.
Encourager l’autonomie avec un soutien progressif : S’il renverse de l’eau, on peut lui montrer comment nettoyer avant de lui demander de le faire seul.
Éviter les réactions disproportionnées : Dire « Tu nettoies, c’est normal » sur un ton dur n’a pas le même effet que « Oups, il y a de l’eau par terre. Tu veux que je te montre comment l’essuyer ? »
Enfin, face à ce genre de contenu sur les réseaux, mieux vaut prendre du recul, ne pas partager pour éviter de leur donner plus de visibilité (pardonnez-moi pour cet article à visé informative) , et privilégier des approches qui respectent réellement le développement de l’enfant.
Comment réagir face à ce mouvement « ghettosorri » ?
Le « ghetto-sori » se présente comme une alternative à l’éducation bienveillante, mais repose en réalité sur des méthodes qui peuvent être problématiques pour les enfants. Derrière une apparente efficacité et probablement une volonté de faire de l’humour et surtout le buzz, on trouve surtout le risque d’un retour aux rapports de force et aux violences éducatives ordinaires. (Ou à son amplification, comme les veo sont encore très présentes en France). L’autonomie et le respect ne s’apprennent pas dans la peur, mais dans un cadre ferme et bienveillant. Alors avant d’adopter une tendance virale, mieux vaut se poser une question : est-ce que cela aide réellement mon enfant à grandir sereinement ?